Le « verdissement » est à l’œuvre sur l’axe Rhône-Saône-Méditerranée

Une conférence du salon Riverdating à Lyon a été consacrée au « verdissement » des bateaux fret et tourisme, plus particulièrement sur l’axe Rhône-Saône, ou comment « décarboner le transport fluvial » à court, moyen et long termes.

Le « verdissement » de la flotte fluviale a fait l’objet d’une conférence lors du salon Riverdating à Lyon le 15 octobre 2021. L’occasion de rappeler d’abord que différentes réglementations incitent la navigation intérieure à s’engager dans la transition énergétique et écologique dans le contexte du défi climatique.

« Le règlement EMNR, entré en vigueur en 2017, nous a poussé vers des solutions, notamment de dépollution, pour réduire les polluants locaux. Les zones à faibles émissions déjà mises en place ou celles qui vont l’être dans de grandes agglomérations limitent les déplacements routiers pour agir sur ces mêmes polluants et les ZFE vont finir par concerner le fluvial. A partir de 2035 et jusqu’en 2050, les efforts devront porter sur la réduction des autres polluants comme les gaz à effet de serre » a rappelé Cécile Cohas, chargée de recherche et innovation à la direction territoriale Rhône-Saône de Voies navigables de France (VNF).

Cette responsable a indiqué que les engagements pour la croissance verte (ECV) du fluvial signés en juillet 2021 durant l’Assemblée générale d’E2F fixent des objectifs à court, moyen et long termes pour « décarboner le transport fluvial ».

Des expérimentations et des études

Atteindre la décarbonation passe par un mix de solutions, des carburants alternatifs, de l’hybridation à l’électricité avec batteries, au gaz « vert », à l’hydrogène…

L’électrification des quais pour le branchement des bateaux lors des escales pour ne plus utiliser de groupe électrogène fait partie des solutions les plus immédiates et, en plus de diminuer les émissions, participe à réduire la nuisance du bruit.

La récupération de chaleur des échappements (ORC) en est une autre et fait l’objet d’une expérimentation sur le Rhône. Le principe de l’ORC consiste à récupérer la chaleur des gaz d’échappement et de l’eau de refroidissement du moteur pour produire de l’électricité qui sert ensuite aux besoins de l’équipage. L’équipement d’un premier bateau est prévu en 2022, suivi d’un test d’une année. L’objectif de VNF est de soutenir ensuite le déploiement des systèmes ORC au sein de la flotte fluviale.

« Pour la période 2035 à 2050, nous sommes dans la prospective en menant, par exemple, des études, sachant que les solutions vont être différentes selon les bateaux, la manière dont ils naviguent, les usages, les distances, etc. » a ajouté Cécile Cohas.

Parmi les études, il y a celle menée avec l’IFP énergies nouvelles (IFPEN) qui vise à apporter, d’ici la fin 2021, aux professionnels, aux collectivités et aux établissements de financement toutes les informations nécessaires pour dimensionner les besoins futurs de la flotte et réaliser les meilleurs choix coûts/technologies pour le « verdissement » des bateaux.

Il y a également le programme de recherche « Promovan » qui existe depuis 2009 et se poursuit désormais avec une déclinaison « hydrogène » (« Promovan H2 »).

Il ne faut pas oublier l’utilisation du gaz to liquid (GTL) à la place du diesel depuis 2019 pour la vedette de service Rhône et qui pourrait être équipé, à terme, d’une motorisation neuve utilisant exclusivement l’énergie issue de l’hydrogène. Ou encore le nouveau ponton multifonction Valsaôna qui est le premier bateau fluvial en Europe qui respecte la nouvelle norme EMNR (équivalent Euro 6) et équipé d’un filtre à particules.

Opter pour des solutions répondant aux exigences futures

Le « verdissement » est aussi à l’œuvre sur les autres bassins. Comme exemples cités lors de la conférence, un premier bateau à l’hydrogène sera mis en service par le groupe Sogestran en 2022 sur la Seine. Cette compagnie réalise également une expérimentation avec le B100.

Les groupes Cemex et Lafarge réfléchissent au rétrofit d’unités existantes et/ou à la construction neuve de bateaux « verts » tout en utilisant déjà eux aussi du GTL sur la Seine.

Cécile Cohas a alerté sur la nécessité de travailler « dès maintenant pour s’assurer que les nouvelles énergies » (gaz et hydrogène« verts » notamment) « seront bien disponibles pour le mode fluvial » mais aussi « que les exigences d’aujourd’hui répondent à celles de demain » ou encore prendre en compte la longue durée de vie des bateaux.

Jean Hervouet, chef de projet à la Compagnie nationale du Rhône (CNR), a mis en avant « l’abondement d’1 million d’euros que nous apportons au plan d’aide à la modernisation et à l’innovation » de VNF. « C’est l’un des leviers pour agir sur le verdissement de la flotte fluviale et sur les évolutions de motorisation des bateaux du bassin Rhône-Saône ».

L’abondement de la CNR va soutenir des projets concernant le bassin Rhône-Saône uniquement, et en priorité pour des bateaux navigant sur le Rhône. Le montant se répartit en 300 000 euros en 2022 et 700 000 euros pour le prochain PAMI 2023-2027.

Laurence Cerclier, responsable des opérations de la compagnie Les Bateaux Lyonnais, a témoigné de la réalité du « verdissement » du point de vue d’un acteur économique du tourisme fluvial : « Nous disposons déjà de l’alimentation à quai pour les servitudes mais nous avons besoin de bornes de haute puissance pour nous engager dans une évolution de la motorisation de nos bateaux vers l’électricité. Nous réfléchissons aussi à l’hydrogène. Il n’est pas facile de choisir une solution aujourd’hui avec la certitude qu’elle soit pérenne sur le long terme. Il faut prendre en compte que les montants d’investissements pour la transition énergétique des bateaux sont élevés pour une entreprise privée comme la nôtre. Nous sommes conscients des attentes de la ville, de la métropole mais aussi des passagers et de la clientèle ainsi que des riverains, nous sommes assimilés à des bateaux-hôtels alors que nous faisons de la promenade, de la restauration et organisons des événements privatifs à bord. Nous constatons d’ailleurs que de plus en plus souvent, les entreprises qui viennent vers nous pour un événement nous demande notre politique RSE qui devient un critère de choix et nous y faisons attention ».

Source : NPI.