Traitement des sédiments de dragage portuaires et fluviaux : une filière à créer

Avec la crise sanitaire de cette année 2020, la Région Hauts-de-France souhaite davantage mettre l’accent sur l’importance du développement durable et de l’économie circulaire. C’est ainsi, que le 30 juin 2020, un « plan de relance » orienté « durable » a été voté par le Conseil régional. Il a pour vocation à rendre le territoire plus attractif, compétitif, créateur d’emplois et de valeur ajoutée et inclut un plan de développement de l’économie circulaire.

L’un des enjeux principaux de l’économie circulaire, est de bousculer l’ordre établi de l’économie linéaire, pour cela il est nécessaire de construire des modèles et de démontrer leur viabilité et leur réplicabilité. C’est dans cette philosophie que la « démarche Sédimatériaux » a été mise en place, faisant partie de cette vision économique.

Du statut de déchet à une nouvelle ressource :

Sédimatériaux est une démarche de coopération, à l’échelle nationale, pour l’émergence de filières de gestion et de valorisation, à terre, des sédiments de dragage portuaires et fluviaux.

Les sédiments issus du dragage représentent en France environ chaque année 50 millions de m3 pour les ports et 6 millions de m3 pour le réseau fluvial. Les besoins d’extraction de sédiments estimés par VNF sur les seuls départements du Nord et Pas de Calais sont de 9 à 10 millions m3 sur 20 ans. Mais les voies pour leur traitement et leur valorisation sont confrontées aux nouvelles exigences réglementaires et aux attentes sociétales.

A titre d’exemple, selon sa qualité, un sédiment portuaire peut être rejeté en mer, ou doit être géré à terre. La gestion à terre de ce type de « matériaux » peut être problématique pour les maîtres d’ouvrage, et la règlementation concernée et la classification qui lui est rattachée nécessitent d’être précisées pour permettre une réelle valorisation.

Selon Aurore COLSON, Conseillère régionale Déléguée à l’Économie Circulaire : « Bien entendu, qui dit Région « fer de lance » sur la question de la gestion des sédiments, dit aussi un atout attractif et compétitif indéniable pour l’ensemble de nos entreprises. Mais je pense tout particulièrement à nos ports, et si nous dragons, si nous curons de manière correcte et avec un vrai engouement de nos canaux, nous savons aussi que nous pourrons redévelopper la voie d’eau en région et dans le cadre de l’arrivée du canal Seine-Nord Europe. Bien entendu, les canaux secondaires ont toute leur importance dans le maillage du territoire et il sera essentiel de les entretenir de manière correcte. Qui dit entretien, dit sédiments mis de côté. Ces sédiments, bien souvent, sont aussi un problème sur les territoires, quand on doit les stocker, quand on doit les extraire et donc si nous pouvons ensuite les valoriser, bien entendu, là aussi nous levons un frein psychologique sur la question des sédiments auprès de la population, ce qui est quelque chose d’important.  »

Et puis, qui dit matières revalorisables, dit surtout que les sédiments ne seront plus un déchet, dans l’imaginaire collectif, mais deviendront des matières premières.

Et répondre à des enjeux économiques et de développement durable :

Par l’amélioration des connaissances et la maîtrise des impacts de la gestion à terre des sédiments, étapes indispensables à l’évolution du cadre réglementaire, l’émergence et la pérennisation de filières terrestres de « valorisation matière » appliquées aux sédiments permettraient de répondre à de multiples enjeux de développement durable :

• Au regard des enjeux environnementaux :

– Accroître les capacités régionales de transport alternatif par voie d’eau et de limiter les émissions de gaz à effets de serre,

– Démultiplier les opérations de reconquête de la qualité des milieux naturels aquatiques et renforcer la biodiversité

– Participer à la prévention des inondations en facilitant l’écoulement des eaux continentales,

– Limiter l’extraction de ressources naturelles par la production de matériaux de substitution pour les travaux publics (ex. construction de routes, de quais portuaires ou de digues), ou la réhabilitation de sites (ex. rechargement de plages soumises à l’érosion)

• Au regard des enjeux économiques :

– Renforcer la compétitivité des ports français par la diminution du coût de traitement de certains sédiments et l’intégration d’une approche environnementale de gestion des ouvrages portuaires,

– Développer plusieurs filières industrielles de valorisation des sédiments et renforcer l’innovation dans ce domaine,

– Développer rapidement l’ensemble des activités économiques liées au transport de marchandises et de personnes par voies d’eau sur les domaines maritime et continental,

– Répondre à la pénurie actuelle de matières premières en travaux publics sur la région parisienne et d’ici une dizaine d’années en région Nord-Pas de Calais, dans le respect de l’environnement

• Au regard des enjeux sociaux et sociétaux :

– Diminuer les tensions et faciliter la gestion des conflits autour des zones de dépôt et de stockage des sédiments,

– Développer les aménités sur les domaines fluviaux et maritimes,

– Créer des emplois dans les nouvelles filières industrielles de valorisation.

La démarche Sédimatériaux entend produire de la connaissance pour aider les donneurs d’ordre à innover en réalisant des ouvrages à base de sédiments de dragage. C’est aujourd’hui la méthodologie de référence en France de valorisation des sédiments portuaires et fluviaux, méthodologie certifiée et validée par les scientifiques. Dans le même temps, cette démarche permet de produire les données utiles à l’évolution du cadre réglementaire. Elle a ainsi permis de faire émerger de nouvelles filières économiques de traitement et de gestion des sédiments : béton, aménagement paysager, ciment, agronomie, composite…