Les aspects organisationnels liés aux accidents en navigation intérieure

Les études sur les accidents de navigation intérieure, lancées par EBU, OEB/ESO, IWT, IVR, ont été finalisées en février 2022 et détaillent plusieurs recommandations. L’étape suivante est l’élaboration d’une feuille de route partagée par les parties prenantes concernées pour une mise en œuvre concrète de mesures.

Les études se sont basées sur le questionnaire international pour les capitaines et l’industrie de la navigation intérieure, suivi de visites sur des bateaux qui comprenaient des entretiens et des observations pour obtenir un aperçu complet de l’organisation à bord. Des bateaux plus anciens et plus récents de différentes tailles ont été visités. En outre, une comparaison avec d’autres secteurs des transports, comme le rail et l’aviation, a été faite pour identifier comment les normes, les réglementations et les lignes directrices sont utilisées pour créer un environnement de travail efficace et sûr.

Résultats
  1. Communications
    La grande majorité des répondants – 96 % – estiment qu’une communication inadéquate ou de mauvaise qualité avec les autres usagers de la voie navigable est une cause importante d’accidents en transport fluvial. L’étude précise qu’il peut y avoir un certain nombre de problèmes de communication entre les bateaux, par exemple une utilisation limitée des protocoles de communication et de la phraséologie standard, une maîtrise limitée d’une langue commune partagée, ce qui est lié à l’internationalisation croissante du personnel. Tous ces facteurs, associés à une forte adoption de l’automatisation, peuvent contribuer à un faux sentiment de sécurité entraînant des erreurs et des accidents (potentiels).
  2. Qualification des membres d’équipage
    Une observation cruciale faite au cours de la réalisation de ces études est liée à un besoin de développement personnel tout au long de la vie puisque les compétences du personnel et de l’équipage peuvent contribuer aux accidents. Le développement tout au long de la vie, y compris le recyclage périodique, n’est jusqu’à présent pas une pratique courante dans le secteur. Une grande partie des répondants – 94%, ont indiqué que les compétences « limitées » à bord sont une cause importante d’accidents, citant notamment le manque d’expérience et de savoir-faire de certains.
  1. Fatigue et stress
    À partir des données et de l’analyse d’experts – Partie 1 de cette étude – il a été conclu que la fatigue en elle-même ou en tant que facteur contributif est impliquée dans de nombreux accidents. Le groupe de discussion « Sailing for Excellence » a explicitement demandé que l’on prête attention à la culture organisationnelle. Le rôle des opérateurs de bateaux fluviaux, la planification, la situation aux terminaux, les processus administratifs et la préparation du voyage peuvent entraîner une forte pression opérationnelle qui augmente la charge de travail, la distraction et éventuellement la fatigue des bateliers. Les résultats du questionnaire ont confirmé l’importance de la fatigue et du stress. La distraction par les médias est considérée comme la cause principale, suivie par un rythme travail-sommeil sous-optimal, le multitâche et l’exécution de trop de tâches par la même personne. De plus, les personnes interrogées mentionnent les nombreuses heures de travail et la pression externe comme des causes importantes.

    Les navires et l’équipage font partie d’un écosystème complexe, comprenant des terminaux, des ports, des clients, etc. Le rôle des conducteurs de bateaux est mis en avant pour leur responsabilité finale dans la sécurité de la navigation et de l’exploitation des bateaux. Cependant, ils ont des options limitées lorsqu’ils ferment la boucle de la chaîne d’approvisionnement, font face à des retards ou modifient leurs plans. Cela exerce une pression sur l’équipage et peut conduire à des concessions involontaires sur les risques opérationnels, y compris la sécurité, comme la bonne planification du voyage, la navigation dans des conditions difficiles ou des régimes travail-repos sous-optimaux.
  1. Situations particulières des voies d’eau
    La situation spécifique des voies navigables fait référence aux aspects de l’infrastructure et de la zone de navigation et à la navigation dans des conditions météorologiques/de croisière qui pourraient créer un risque d’accident en navigation intérieure. Enfin et surtout, on pense que ceux-ci contribuent – dans une moindre mesure – aux accidents, par exemple en raison d’une connaissance limitée de la zone de navigation et des infrastructures « en route » (91 %) et de la pression pour naviguer par mauvais temps/conditions de croisière (76 %). En pratique, les bateliers éprouvent des difficultés à accéder facilement à des informations fiables, telles que les hauteurs d’eau réelles.
Recommandations

La première recommandation du rapport est de mettre à jour et d’améliorer les protocoles et les lignes directrices sur la communication VHF dans la navigation intérieure, notamment en incorporant le passage à une langue nautique partagée dans l’ensemble de l’écosystème de navigation intérieure.

La deuxième recommandation est de développer une vision intégrale sur le développement personnel tout au long de la vie pour les membres d’équipage, en particulier sur la gestion/l’entrepreneuriat et les compétences non techniques. Les apprentis devraient être plus encadrés pendant la navigation et plus de pratique devrait être intégrée dans leur formation.

La troisième recommandation est d’explorer les possibilités de répartir la responsabilité des opérations de manière plus limitée dans le temps et de réduire le nombre d’intervenants extérieurs.

La quatrième recommandation est de développer une vision partagée du poste de capitaine et les exigences minimales d’information et d’automatisation nécessaires à un tel poste, y compris la planification d’itinéraire, les conventions minimales de dégagement de sécurité, mais aussi l’utilisation de systèmes non liés à la tâche, comme les réseaux sociaux personnels. médias et télévision.

Enfin, la cinquième recommandation propose de développer une base de données centrale de la navigation intérieure européenne qui inclue des définitions claires et des informations globales, permettant de tirer les leçons des accidents antérieurs et d’éviter qu’ils ne se reproduisent à l’avenir.

Pour mettre ces recommandations en pratique, il est proposé « d’élaborer une feuille de route impliquant toutes les parties prenantes concernées par la navigation intérieure » afin qu’elles soient partagées et donc adoptées puis mises en œuvre par le plus grand nombre.

Les résultats des études peuvent être récupérés via les liens suivants :
Rapport Phase 2a – cliquez ici
Rapport Phase 2b – cliquez ici