Comment Toulouse veut relancer le fret sur le Canal du Midi

En partenariat avec Toulouse Métropole, Voies navigables de France (VNF) vient d’émettre un appel à manifestation d’intérêt dans l’espoir de relancer une activité de fret fluvial sur le Canal du Midi. Ainsi, plusieurs acteurs économiques seraient intéressés pour y faire de la logistique urbaine. Les détails du projet.

En quelques mois, la quatrième ville de France va donner un tout autre visage à sa logistique urbaine. D’ici la fin de l’année, la zone de Fondeyre, au nord de la ville, va abriter une zone dédiée à cette activité d’une surface totale de près de 20 000 m2. Entre 50 000 et 60 000 colis par jour transiteront par cette plateforme moderne avant d’être acheminés dans le centre-ville par des véhicules légers. Mais pourquoi pas des bateaux pour effectuer ce dernier kilomètre ?

C’est en tout cas le souhait de plusieurs entités à Toulouse. « Il y a eu des prises de contact en ce sens avec plusieurs acteurs économiques qui ont initié des démarches similaires dans d’autres villes », fait savoir Ghislain Frambourt, le directeur adjoint de VNF à Toulouse en charge du dossier.

Le dirigeant fait notamment référence à la ville de Strasbourg qui a aussi mené un appel à projet à ce sujet avec VNF. Ainsi, en juillet 2020, le duo a retenu la société Urban Logistic Solutions. L’objectif visé par celui-ci était la création d’une navette fluviale acheminant quotidiennement des marchandises depuis la périphérie de Strasbourg jusqu’à son centre-ville avec la réalisation des derniers mètres par des modes faiblement polluants. Dans le cas strasbourgeois, l’expérimentation mêle donc à la fois du transport de marchandises par des péniches et un dernier kilomètre effectué en vélo cargo à assistance électrique.

Accueillir des acteurs sur une zone dédiée de 10 000 m2

Fort de cet exemple, car évoqué depuis de nombreuses années mais jamais concrétisé, le fret fluvial sur le Canal du Midi pourrait bien revenir au goût du jour dans les prochains mois. En partenariat avec la collectivité de Toulouse Métropole, VNF vient donc de lancer un appel à manifestation d’intérêt (AMI) pour faire renaître prochainement une telle activité dans la Ville rose.

« Le Canal des deux mers a été conçu pour le transport de marchandises, et notamment pour éviter de passer par le détroit de Gibraltar. Mais le fret a été stoppé sur cette infrastructure, pour des raisons économiques, entre 1989 et 2001, selon les zones géographiques. Donc notre ambition est de faire renaître cette activité », remémore Ghislain Frambourt.

Pour transformer l’essai, VNF mise beaucoup sur une plateforme terrestre de 10 000 m2 située dans la zone de Fondeyre en sa possession et à proximité immédiate du Canal du Midi. L’établissement public mise aussi sur l’exploitation et l’optimisation d’infrastructures existantes comme les Cales de Radoub, le Bassin des Filtres ou encore quelques petits ports. « Mais l’objectif n’est pas d’installer une zone industrielle en plein centre-ville », tient de suite à rassurer le gestionnaire.

Dans ce contexte, les entreprises intéressées ont jusqu’au 30 octobre pour se manifester et proposer un dossier tout en cochant plusieurs cases. Au-delà d’être basés sur une activité de transport fluvial, les projets proposés devront tout d’abord participer au développement économique de la métropole et être complémentaires des activités déjà en place. De plus, les candidats devront démontrer leur bilan environnemental, exposer leur vision de la multimodalité et notamment décrire la phase de déchargement dans le centre-ville, ainsi que leurs projets d’aménagement souhaités sur la plateforme de Fondeyre.

« Sur celle-ci, l’idée est de regrouper plusieurs acteurs ayant une activité de fret fluvial et créer des synergies entre eux afin de créer un pôle spécialisé en la matière », décrit Ghislain Frambourt.

Un concours de circonstances favorable sur le papier

Une fois les dossiers déposés, une période de dialogue s’ouvrira alors avec les intéressés, aussi bien pour écouter leurs besoins en soutien divers et variés, mais aussi pour prendre en compte les attentes de Toulouse Métropole et VNF dans cette opération. Une fois les idées développées, le duo publiera officiellement un appel à projets pour retenir une ou plusieurs expérimentations. « Si tout le monde est satisfait, cela pourrait aller assez vite avec des premières expérimentations lancées dans quelques mois » juge le représentant de VNF.

Si Ghislain Frambourt affiche un tel optimiste c’est que cette idée est plus que jamais dans l’air du temps, selon lui. « Le transport fluvial a des avantages environnementaux. À charges égales, il émet quatre à six fois moins qu’un camion doté d’un moteur thermique, sans parler du fait que cela réduirait les nuisances sonores et les camions dans le centre-ville », développe-t-il.

Un aspect non-négligeable à l’heure où Toulouse planche sur l’entrée en vigueur prochaine d’une zone à faibles émissions (ZFE) pour son centre-ville. Pour mémoire, ce dispositif vise à sortir progressivement d’un périmètre déterminé les véhicules les plus polluants au fil des années.

Enfin, le passage de bateaux de marchandises, qui nécessitent une importante profondeur d’eau, supérieure à celle des activités touristiques, permettrait de draguer le Canal du Midi, c’est-à-dire d’empêcher l’accumulation de la vase dans son fond. Autrement dit, l’activité de fret fluvial permettrait d’entretenir naturellement l’édifice pluri-centenaire, ce qui éviterait la répétition régulière de certaines opérations de maintenance coûteuses. Sur le papier, toutes les conditions semblent donc réunies pour faire revenir la logistique fluviale au cœur de la ville de Toulouse.